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Action en garantie des vices cachés – délais

Action en garantie des vices cachés – délais

Le délai pour agir en garantie des vices cachés est de 2 ans à compter de la découverte du vice (article 1648 du code civil).

Depuis plusieurs années, la Cour de cassation précisait que ce délai serait par ailleurs enfermé dans un délai de 5 ans à compter de la vente (Cass., Civ 1, 24 octobre 2019, n°18-14.720, inédit ; Cass., Civ 1, 6 novembre 2019, n°18-21.481, inédit ; Cass., Civ 1, 22 janvier 2020, n°18-23.778, inédit ; Cass., Civ 1, 8 avril 2021, n°20-13.493, publié au bulletin).

Il faudrait donc que le vice apparaisse dans les 5 ans de la vente ; au-delà, la garantie des vices cachés ne pourrait plus être mise en œuvre.

Il faut noter que les conditions générales ne lient les parties et ne sont Cette solution pose de nombreuses difficultés, notamment en matière de construction, puisque le délai du maître d’ouvrage ou de l’acquéreur, pour agir à l’encontre du constructeur, est de 10 ans à compter de la réception de l’ouvrage, alors que le délai dont dispose le constructeur pour se retourner contre son fournisseur de matériaux ne serait que de 5 ans à compter de l’achat des matériaux affectés du vice caché (article L110-4 du code de commerce).

Si cette solution était moins gênante lorsque le délai de l’article L110-4 du code de commerce était de 10 ans (jusqu’en 2008), ce n’est plus le cas aujourd’hui.

Par plusieurs arrêts récents, la Troisième chambre civile de la Cour de cassation, qui traite des dossiers de construction, a eu la possibilité de contester fermement cette jurisprudence et de rappeler que le délai de 2 ans doit être encadré par le délai butoir de 20 ans, prévu à l’article 2232 du code civil.

S’agissant des ventes antérieures à 2008 (l’article 2232 ayant été créé lors de la réforme de 2008), l’action du constructeur à l’encontre du fabriquant vendeur doit être considérée comme suspendue tant qu’aucune action n’a été introduite par le maître de l’ouvrage à l’encontre du constructeur.

En résumé :

Ventes avant 2008

« l’entrepreneur ne pouvant pas agir contre le vendeur et le fabricant avant d’avoir été lui-même assigné par le maître de l’ouvrage, le point de départ du délai qui lui est imparti par l’article 1648, alinéa 1er, du code civil est constitué par la date de sa propre assignation et […] le délai de l’article L. 110-4, I, du code de commerce, courant à compter de la vente, est suspendu jusqu’à ce que sa responsabilité ait été recherchée par le maître de l’ouvrage (3e Civ., 16 février 2022, pourvoi n° 20-19.047, publié). »

Ventes après 2008

–  reconnaissant au professionnel la faculté de résilier le contrat sans « l’encadrement dans le temps de l’action en garantie des vices cachés ne peut être assuré que par l’article 2232 du code civil qui édicte un délai butoir de vingt ans à compter de la naissance du droit (3e Civ., 8 décembre 2021, pourvoi n° 20-21.439, publié). »

Dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 25 mai 2022 (Cass., Civ 3, 25 mai 2022, n°21-18.218, publié), il s’agissait de vice caché affectant des plaques de couverture en fibrociment, entraînant des infiltrations en toiture :

– Les plaques avaient été vendues en mai, octobre et novembre 2008
– Ces plaques avaient été utilisées pour la construction d’un bâtiment agricole
– Le maître d’ouvrage avait assigné le constructeur en octobre 2018 pour solliciter la désignation d’un expert judiciaire, en raison des infiltrations en toiture
– L’assureur du constructeur avait assigné en ordonnance commune en février 2020 le fournisseur et le fabricant des plaques de fibrociment.

La Cour de cassation juge que :

« La cour d’appel a relevé que l’entreprise et son assureur avaient été assignés par le maître de l’ouvrage, le 31 octobre 2018, pour des désordres de la toiture, de sorte que l’action de la société Aviva formée contre les sociétés Socobati et Eternit par actes du 4 février 2020, n’était pas prescrite et que l’assureur de l’entrepreneur justifiait d’un motif légitime pour solliciter l’extension des opérations d’expertise au fournisseur et au fabricant. »

Au-delà du secteur de la construction, l’application du délai butoir de 20 ans au lieu d’un délai de 5 ans va dans le sens de la lutte contre l’obsolescence programmée (évitant ainsi que les produits aient une durée de vie limitée à 5 ans) et de l’amélioration de la qualité des produits.

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Selviye Cerrahoglu
Avocat à la Cour

Ordonnance du 20 mai 2022 : analyse

Ordonnance du 20 mai 2022 : analyse

Dans le cadre de la crise sanitaire le gouvernement a ordonné la fermeture d’établissements recevant du public non indispensables à la vie de la Nation par voie d’arrêté (Arr. 14 mars 2020, NOR SSAZ2007749A : JO, 15 mars). Étaient ainsi concernés les restaurants et débits de boissons (catégorie N).

Face à cette perte, certains restaurateurs ont sollicité à leurs compagnies d’assurance une indemnité au titre de la perte d’exploitation qu’ils ont subi en mesures des fermetures administratives.

Une bataille s’est donc créée entre les compagnies d’assurance et les assurés.

Les assurés considéraient qu’ils étaient garantis par leur police d’assurance et qu’aucune clause d’exclusion ne s’appliquait en raison de la fermeture administrative de leurs établissement à laquelle ils ont été contraint.

Si certains assureurs ont pu indemniser les pertes d’exploitation en considérant que l’assuré était couvert par le « risque de pandémie », d’autres assureurs, ont considéré que le « risque de pandémie » n’était pas assurable au titre de la garantie « perte d’exploitation sans dommages ». 

Les conseils du Cabinet

L’article ci-après décrit les éléments de fait et de droit de l’Ordonnance de référé rendue par le Tribunal de commerce de Paris le 22 mai 2020 (RG n°2020017022) et constitue la première décision de toute une série de contentieux opposant les compagnies d’assurances à leurs assurés au titre de la garantie perte d’exploitation.

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Caroline Baza
Avocat à la Cour

Les conditions générales de vente

Les conditions générales de vente

Les conditions générales sont des documents destinés à encadrer les relations contractuelles (la vente, l’achat ou les services), à organiser leur exécution et prévenir des difficultés éventuelles.

Dans cet article nous nous intéresserons particulièrement à certaines clauses que l’on peut trouver dans des conditions générales de vente (dites « CGV ») régissant les rapports contractuels entre professionnels et consommateurs utiles pour les parties.

Au sens du Code de la consommation, est considéré comme consommateur toute personne physique qui agit à des fins qui n’entrent pas dans le cadre de son activité commerciale, industrielle, artisanale, libérale ou agricole.

Il faut noter que les conditions générales ne lient les parties et ne sont opposables au consommateur qu’à deux conditions (article 119 du Code civil) :

–  elles doivent avoir été portées à la connaissance du consommateur de façon apparentelisible et compréhensible (i)

–  le consommateur doit les avoir acceptées (ii).

Le vendeur professionnel peut transmettre les CGV soit physiquement, soit par voie électronique. En cas de transmission par voie dématérialisée, elle doit s’effectuer dans un format standard. Étant précisé que le seul droit d’accès à un site internet ou la communication d’un lien hypertexte ne suffit pas.En fonction de la relation qu’elles encadrent – entre un professionnel et un consommateur (B to C) ou entre professionnels (B to B) – la nature du bien ou la prestation commandée, certaines clauses peuvent se révéler plus ou moins importantes.De manière générale, les conditions générales opposables aux consommateurs sont fortement encadrées. Un certain nombre de clauses sont ainsi interdites en ce qu’elles sont considérées « abusives ».

Une liste noire et grise des clauses abusives a d’ailleurs été établi par la DGCCRF.

C’est le cas notamment des clauses :

–  prévoyant un engagement ferme du consommateur, alors que l’exécution des prestations duprofessionnel est assujettie à une condition dont la réalisation dépend de sa seule volonté,

–  visant à écarter ou à limiter la responsabilité du professionnel d fait de produits défectueux,

–  ayant pour objet ou pour effet de stipuler une date indicative d’exécution du contrat,

–  reconnaissant au professionnel la faculté de résilier le contrat sans préavis d’une durée raisonnable,

–  limitant ou excluant la responsabilité du vendeur.

Dans l’hypothèse où le professionnel insère ce type de clauses elles seront réputées nulles et non écrites.

Le vendeur professionnel devra donc éviter l’insertion de ce type de clauses dans ses CGV. A défaut, l’existence de l’une de ces clauses dans les conditions générales devrait alerter le consommateur sur le sérieux des produits ou services proposés par le vendeur professionnel.

Elles doivent mentionner toute information permettant au consommateur de connaitre l’identité du vendeur, soit son nom ou sa dénomination sociale, sa structure juridique (SAS/SARL/microentreprise…), son SIRET, ses coordonnées postales, téléphoniques et électroniques, son numéro d’identification s’il est assujetti à la TVA, son titre s’il est membre d’une profession réglementée.

QUE FAUT-IL VERIFIER DANS LES CONDITIONS GENERALES DE VENTE B TO C ?

En tout état de cause, il est utile pour le professionnel d’insérer dans ses CGV les clauses suivantes, tout comme il est utile pour le consommateur de vérifier leur existence :

Coordonnées du professionnel et son identité

Dans le cas du e-commerce, ces informations se trouvent dans les « mentions légales » du site internet.

Concrètement, ces informations permettront au consommateur de vérifier l’existence légale du vendeur, la licéité de son activité et de prendre contact avec le professionnel en cas de difficultés rencontrées dans l’exécution du contrat et notamment lors de la livraison du produit ou du service.

Les informations relatives au produit ou au service proposé

Le vendeur professionnel doit indiquer toutes les informations relatives aux caractéristiques essentielles du bien ou du service acheté ou commandé par le consommateur, pour qu’il puisse avoir connaissance des caractéristiques du produit ou du bien avant de le commander.

Si le consommateur achete du matériel ou du contenu informatique une vigilance particulière est requise sur l’interopérabilité du logiciel ou du matériel acheté avec le matériel ou le logiciel informatique dont il dispose déjà.

Le prix

Le vendeur doit indiquer le prix du produit ou du service proposé, ou à défaut, son mode de calcul.

S’agissant du prix ou de son mode de calcul une attention particulière du consommateur devra être portée en cas de vente en ligne notamment. Il devra être vigilant sur les frais supplémentaires qui pourront être ajoutés au prix du bien ou du service tels les frais de transport, de livraison ou d’affranchissement, ainsi que les taxes qui pourraient éventuellement être ajoutées.

Les modalités de paiement

Le paiement peut être effectué à la commande ou à la livraison, en une fois ou en plusieurs fois. Dans ce dernier cas, le vendeur devra indiquer les échéances de paiement, et les éventuels intérêts ou majorations sur le prix.

Il peut être utile pour le consommateur de vérifier le type de paiement proposé. Par exemple, si le consommateur procède à l’achat d’un produit ou d’un service en ligne, en général, le professionnel sollicitera le paiement en ligne via un intermédiaire (PayPal, Stripe…) qui lui demandera, à son tour, d’accepter leurs propres conditions générales.

Enfin, il est conseillé au consommateur de toujours vérifier si par l’achat d’un produit ou d’un service précis les CGV ne prévoient pas un abonnement annuel.

Le délai de livraison ou d’exécution

Si le professionnel n’a communiqué aucune date de livraison, il dispose alors d’un délai légal maximal de trente jours pour procéder à la livraison. Vérifier l’existence de cette clause permettra au consommateur d’éviter d’être livré dans un délai déraisonnable ou dans un délai qui ne lui conviendrait pas.

Durée du contrat


Si le contrat est conclu à durée déterminée il est utile pour le consommateur de vérifier l’existence ou non d’une clause de reconduction tacite et les conditions de sa reconduction.

S’il est conclu à durée indéterminée, le consommateur doit vérifier les conditions de résiliation : destinataire, délai de préavis et mode de résiliation (courriel électronique ou lettre recommandée avec avis de réception).

Le délai de rétractation pour les contrats conclus à distance

Pour les contrats conclus hors établissement ou à distance (achat par correspondance, téléphone, télé-achat ou en ligne), la loi prévoit par principe un délai de 14 jours francs qui court soit à la réception du bien, soit à la conclusion du contrat (article L. 221-18 du Code de la consommation).

Le vendeur a l’obligation de mentionner le droit de rétractation dans les CGV. A défaut, ce délai est prolongé de douze mois à compter de l’expiration du délai (article L. 221-20 du Code de la consommation).

Les frais de renvoi du produit sont en principe à la charge du consommateur, sauf si le professionnel a omis de le préciser. Dans ce cas, les frais devront être supportés par le professionnel.

Le consommateur devra ainsi vérifier si le vendeur avait indiqué dans les CGV si le délai de rétractation et les frais de renvoi du produit étaient ou non à sa charge.

Le droit de rétractation est toutefois exclu dans certains types de contrats expressément listés (13 au total) par l’article L. 221-28 du Code de la consommation, il s’agit notamment des contrats :

– pleinement exécutés avant la fin du délai de rétractation et dont l’exécution a commencé après accord préalable exprès du consommateur et renoncement exprès à son droit de rétractation (telle une prestation en ligne : formation),

– fourniture de biens susceptibles de se détériorer ou de se périmer rapidement (tels des aliments),

– fourniture de biens confectionnés selon les spécifications du consommateur ou nettement personnalisés (tel l’achat de vêtements sur mesure),

– de prestations de services d’hébergement, autres que d’hébergement résidentiel, de services de transport de biens, de locations de voitures, de restauration ou d’activités de loisirs qui doivent être fournis à une date ou à une période déterminée.

Les professionnels sont tenus d’indiquer dans les CGV les coordonnées du médiateur de la consommation dont ils relèvent. En cas de litige le consommateur peut recourir gratuitement à la médiation. Les frais sont à la charge des professionnels.

Si la médiation échoue, les parties pourront toujours saisir les juridictions compétentes. L’article L. 141-5 du Code de la consommation, prévoit que « le consommateur peut saisir à son choix, outre l’une des juridictions territorialement compétentes en vertu du code de procédure civile, la juridiction du lieu où il demeurait au moment de la conclusion du contrat ou de la survenance du fait dommageable ».

S’agissant des clauses attributives de juridiction, le Tribunal de grande instance de Paris a d’ores et déjà jugé que la clause attributive de juridiction au profit d’une juridiction étrangère était nulle et non écrite dès lors qu’elle contraignant un consommateur français à saisir les juridictions californiennes (5 mars 2015, M. X./ Facebook Inc).

Enfin, en fonction du secteur d’activité la présence d’autres clauses dans les CGV peuvent s’avérer utiles tant pour le consommateur que pour le professionnel (prestations de services fournis par des activités réglementés, type de produits, vente en ligne, vente dans des salons).

N’hésitez pas à contacter un professionnel

– si vous êtes un vendeur/prestataire professionnel et que vous avez des questions sur la rédactionde vos CGV,

– si vous êtes un consommateur et que vous avez des questions sur les CGV qui vous sont opposéespar un vendeur ou prestataire professionnel.

Caroline Baza
Avocat à la Cour

Contrats commerciaux en cours et coronavirus

Contrats commerciaux en cours et coronavirus

Depuis janvier 2020, une épidémie connue sous le nom de « Coronavirus » ou « Covid-19 » et se propageant dans plus de 120 pays laisse craindre une crise économique sans précédent.

Le Covid-19 aura des conséquences économiques pour les entreprises de toute taille et tous secteurs : agriculture, production industrielle, commerces, tourisme, hôtellerie, évènementiel, restauration, sport, éducation…

Dans ce contexte, les entreprises s’interrogent sur le sort de leurs contrats commerciaux en cours.

Si la situation n’est pas appréhendée par les clauses du contrat, en cas de difficultés dans l’exécution des engagements des parties, c’est le droit commun des contrats qui s’applique.

Si votre relation commerciale est régie par un contrat écrit, il conviendra de vérifier l’existence des clauses suivantes :

– retard
– inexécution
– annulation
– force majeure
– imprévision

En présence de ces clauses, les parties devront vérifier si elles ont été aménagées et leur éventuelle application durant l’épidémie. A titre d’exemple, il est possible que les parties aient aménagé l’application de la force majeure prévoyant l’obligation pour le débiteur d’exécuter le contrat même en cas de force majeure (article 1351 du Code civil).

Plus généralement, les parties devront observer l’ensemble des clauses contractuelles pouvant s’appliquer dans ce type de situation, telle une clause imposant un devoir d’information des parties, la renégociation du contrat, sa suspension, ou sa résiliation.

A l’issue d’une réunion avec les partenaires sociaux au Ministère du Travail en date du 28 février dernier, le ministre de l’Économie et des Finances, Bruno Le Maire, a déclaré que le coronavirus sera « considéré comme un cas de force majeure pour les entreprises ».

Mais qu’entend-on par force majeure ? Le Code civil définit cette notion à l’article 1218 dans les termes suivants, « il y a force majeure en matière contractuelle lorsqu’un événement échappant au contrôle du débiteur, qui ne pouvait être raisonnablement prévu lors de la conclusion du contrat et dont les effets ne peuvent être évités par des mesures appropriées, empêche l’exécution de son obligation par le débiteur. Si l’empêchement est temporaire, l’exécution de l’obligation est suspendue à moins que le retard qui en résulterait ne justifie la résolution du contrat. Si l’empêchement est définitif, le contrat est résolu de plein droit et les parties sont libérées dans les conditions prévues aux Articles 1351 et 1351-1 ».

Cet article précise qu’il s’agit d’un évènement :

– « échappant au contrôle » : incontrôlable/cause extérieur
– « qui ne pouvait être raisonnablement prévu lors de la conclusion du contrat » : imprévisible
– « dont les effets ne peuvent être évités » : inévitable/irrésistible

L’appréciation de la force majeure s’effectuera au cas par cas en fonction des circonstances de chaque situation. En ce sens, les cocontractants devront donc s’interroger sur le caractère imprévisible ou non du Coronavirus lors de la signature du contrat et ses effets, et parallèlement, sur la possibilité de rechercher des alternatives d’exécution de leurs obligations pour atténuer les effets préjudiciables de l’épidémie sur leur entreprise, soit la suspension des relations commerciales le temps de l’épidémie.

Pour les contrats conclus après l’annonce de l’épidémie de Coronavirus (après le 13 janvier 2020), la force majeure pourra difficilement être invoquée dès lors que l’épidémie était connue et donc ses effets prévisibles lors de la signature du contrat.

D’autre part, on pourrait également s’interroger sur l’application de la théorie de l’imprévision afin de renégocier les conditions contractuelles des contrats.

En ce sens, l’article 1195 du Code civil prévoit que « Si un changement de circonstances imprévisible lors de la conclusion du contrat rend l’exécution excessivement onéreuse pour une partie qui n’avait pas accepté d’en assumer le risque, celle-ci peut demander une renégociation du contrat à son cocontractant. Elle continue à exécuter ses obligations durant la renégociation. En cas de refus ou d’échec de la renégociation, les parties peuvent convenir de la résolution du contrat, à la date et aux conditions qu’elles déterminent, ou demander d’un commun accord au juge de procéder à son adaptation. A défaut d’accord dans un délai raisonnable, le juge peut, à la demande d’une partie, réviser le contrat ou y mettre fin, à la date et aux conditions qu’il fixe ».

Plus précisément, par renégociation il faut entendre la mise en place de mesures appropriées permettant d’aménager les conditions financières pour les rendre moins onéreuses.

Si l’on considère l’épidémie du coronavirus comme constituant un changement de circonstance imprévisible lors de la conclusion du contrat rendant son exécution excessivement onéreuse pour une partie qui n’aurait, en sa connaissance, pas conclu le contrat, alors les parties pourraient envisager sa renégociation.

La difficulté résidera principalement dans la définition des termes suivants : « changement de circonstances imprévisible ». Toutefois, vous ne pourrez pas bénéficier du régime de l’imprévision si vous avez accepté le risque d’un changement imprévisible des circonstances par une clause contractuelle.

A défaut de clauses prévoyant la force majeure ou l’imprévision, les parties auront la possibilité de saisir les juges compétents pour demander la révision des clauses contractuelles ou mettre un terme au contrat.

Dans tous les cas, les parties devront apprécier les clauses contractuelles au cas par cas et faire preuve de bonne foi lors des négociations. En cas de difficultés, les parties peuvent recourir à la médiation afin de trouver une issue amiable.

Les conseils du Cabinet

– faites part à votre cocontractant des difficultés que vous rencontrez dans l’exécution de vos obligations par lettre recommandée avec demande d’avis de réception

– vérifiez attentivement les clauses contractuelles

– dans la mesure du possible, essayez de renégocier ou aménager de bonne foi les clauses du contrat et son exécution

– formalisez tout nouvel accord par un écrit

Caroline Baza
Avocat à la Cour